Jardin en cours # épisode 02

Jardin en cours

Jardin en cours # épisode 02

Revenir un mois plus tard… A l’explosion du printemps

Le printemps que nous avons eu a été propice au développement rapide de la végétation: arrosage (souvent orageux) faisant suite à des périodes de soleil, les végétaux se sont déployés rapidement, et avec une belle présence. Les floraisons ont été de toute beauté, très abondantes et remarquables. Cette explosion printanière a eu quelque chose de fort réjouissant après cet hiver, qui, pour beaucoup, paraissait sans fin.

Panorama Nord-Ouest: frange chargée de Lonicera et d’aubépines

Dans mon jardin, je n’ai pas de point de comparaison pour savoir si cela est plus ou moins exubérant que les années passées. Mon rapport a lui commence maintenant, l’an 2018 marquant l’année 1 de notre relation, que j’espère longue et fertile.

Aussi, je n’ai pu qu’observer ce qui était, et voir que « cela » poussait.

Le sol, là où le soleil arrive directement, était couvert de primevères qui égayaient de leurs floraisons pastelles le jeune vert de la strate herbacée. Cela rendait presque délicate la marche, si l’on souhaitait ne pas les piétiner, tant il y en avait un peu partout…

J’ai remarqué que le jardin contenait peu voir pas de graminées, la « lutte » ne se trouverait donc pas de ce côté…

En l’espace d’un mois, d’avril à mai, la végétation a littéralement explosé, le vert tendre domine tout, son abondance rendant difficile la lecture de l’espace tant il noie et uniformise.

Panorama vers le Nord: silhouette du laurier noble et du tilleul sur lit d’aubépines
Prendre possession

A partir de quand se sent-on « propriétaire » (dans mon cas, locataire)? Quel est le moment qui fait que l’on se « sent chez soi »?

Ce questionnement, je ne l’avais jamais eu auparavant, si ce n’est dans le cas d’une location d’appartement. La réponse, dans cet exemple, était assez simple: je me sentais chez moi après y avoir emménagé, c’est-à-dire, une fois que mes meubles et mes cartons étaient là, et encore plus lorsque « mes affaires » avaient trouvé une place dans ce nouvel espace.

Mais dans le cas d’un jardin? Qu’est-ce qui fait que l’on se sent « chez soi »? Quand on a planté sa première graine/son premier arbuste/arbre?

Pour ma part, cela a commencé après une série de coups de sécateur (de force).

Panorama Nord-Est: à droite de l’image émerge les premiers effets des tailles, les lianes qui envahissaient les arbres dépérissent

Je répète pourtant à l’envie, dans mes stages d’initiation à la permaculture, qu’avant de tout changer sur un terrain, il est recommandé de passer un an à l’observer par tous les temps. J’ai constaté assez vite que je ne voulais pas d’un certain nombre de végétaux qui sont présents sur le terrain et vont m’empêcher de mener à bien mon projet. Aussi ce non-agir, pour la liste qui suit, n’est pas de mise!

J’ai beaucoup de… ronces, clématites des haies, lierre qui grimpe sur les arbres, quelques thuyas, un grand nombre d’aubépines et de prunelliers, et du Lonicera nitida (celui-là m’a donné des cauchemars).

Vue vers l’Ouest et le village au travers du tilleul: on aperçoit la masse du fourré de Lonicera

A partir de là, je me suis autorisée à jouer à « Edward aux mains d’argent« , en probablement moins subtile!

Ce passage à l’action, à la sélection, m’a fait prendre possession de l’espace. Après ces heures passées à tailler, arracher et nettoyer des végétaux, j’ai senti que cela devenait « mon » jardin. Phénomène étrange au final, car l’on voit ici que l’être humain ferait siennes les choses à partir du moment où il y imprimerait sa trace. Cette réflexion ouvre le champ à des débats philosophiques et sociologiques, dans lesquels je ne plongerai pas ici!…

Nettoyage de printemps

Ma tâche de jardinière consiste donc pour le moment – et pour un bon bout de temps! – à nettoyer. De ce nettoyage résulte une sélection des plantes à conserver de celles que l’on ne souhaite pas voir s’étendre. Le savoir-faire du paysagiste-concepteur joue ici : qu’est-ce que je cherche à faire sur ce terrain? Comment puis-je atteindre ce but dans l’état actuel de mes connaissances? Quel végétal mettre en valeur?

A ces questions, je réponds actuellement par l’usage intensif du sécateur de force, de la cisaille et de la scie, ce qui peut apparaître quelque peu radical! Mais, tel Indiana Jones à la recherche du temple maudit (on a les références que l’on peut!), je souhaite moi aussi avancer dans ma jungle seine-et-marnaise (tout en évitant les malédictions). Je n’ai pourtant pas de lasso (il me serait bien inutile), ni de faucille ou de machette, mais mes outils me permettent de pouvoir débuter physiquement un cheminement dans le terrain.

Vue Nord : l’espace est sombre et plus humide, la clématite des haies règne en maître

Parce qu’au début, il n’est pas possible de faire le tour du jardin: à moins de le faire en lévitation à 1m50 du sol, pour survoler les ronciers.

Friche armée : aubépines, ronces, prunelliers et rosiers des chiens

A chaque venue au jardin, je me fixe des objectifs.

Lors de ma première intervention, je commence à nettoyer en partant de l’angle Nord-Est du terrain et je longe le mur. Je découvre alors un cognassier, couvert d’élégantes fleurs de rosacées blanches teintées de rose. Il est envahi par la clématite des haies: voici une illustration des strates de végétation dont on parle dans le cadre d’un jardin-forêt. Ce linéaire de bordure comprend des arbres et des arbustes, finalement assez peu de ronces car la luminosité n’est pas suffisante. J’avance de 10 mètres linéaires en… une après-midi de travail.

L’angle Est du jardin, après nettoyage (taille au sol) du roncier : une amorce de cheminement devient possible, autour du jardin
Se confronter à la réalité

Car ce travail de nettoyage est… long, très long. Seule, il faut couper, puis tirer les végétaux coupés, pour ensuite les mettre en « tas » pour dégager l’espace. Même si ce travail n’est pas des plus excitants, il permet de (re)trouver des végétaux qui ont été colonisés, phagocytés par d’autres. Ce nettoyage offre au regard l’existant, il permet de prendre connaissance du patrimoine végétal du site, de s’approprier l’espace, de dégager des volumes.

Vue depuis l’angle Est: la jungle ombrée au Nord du jardin, dominée par la clématite des haies. On note que les tonalités de vert sont différentes selon l’ensoleillement.

L’autre réalité du jardin, c’est que, finalement, 830m² (à nettoyer) ce n’est pas une mince affaire! Et qu’il y a du travail à revendre!

Mais je trouve cela enthousiasmant, malgré le caractère ingrat de la tâche.

Car au travers de ce coup de balai (ces coups de sécateur!) c’est l’histoire du lieu qui réapparaît sous mes yeux. Qu’avaient planté les anciens propriétaires? Comment occupaient-ils leur terrain? Quelles étaient leurs cultures?

Ce travail de nettoiement est comme un travail d’archéologue-paysagiste: il permet d’exhumer les traces du passé pour mieux réécrire l’avenir. Il offre de construire avec l’existant pour créer le futur.

C’est pourquoi, même si cela est peu gratifiant, épuisant et parfois démoralisant vue l’ampleur de la tâche, je prends plaisir à agir dans « mon » jardin. Un peu comme une mère qui toiletterait son enfant, lui lavant la peau, brossant ses cheveux pour ôter ses épis et le rendre « tout beau »…

Découvertes #épisode 02

Nettoyer permet donc de trouver des choses, qu’elles soient végétales ou animales…

Cette nouvelle session est marquée par la découverte d’un nouveau cadavre (décidément, le prédateur rôde), cette fois-ci, d’un lapereau.

Cadavre d’un lapereau

Un pied de vigne (sauvage) est aussi (re)trouvé, à proximité du mur Ouest, ce qui semble une place opportune pour cultiver du raisin.

Pied de vigne à l’Ouest

 

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